Interview de Kathryn Greer, Ex- CTO de SmartAngels

Elles sont ingénieuses, entrepreneuses, CTO. Elles, ce sont des femmes inspirantes qui ont réussit à faire leur place dans un monde à l’image « geek » encore très masculine. Régulièrement, nous irons à leur rencontre pour les interroger sur l’évolution de la place des femmes dans la Tech. Nous mettrons à l’honneur leur regard sur ce sujet de société, et nous partagerons leur portrait dans l’espoir d’encourager nos futures Women in Tech, et bousculer un peu les <codes> (sans mauvais jeu de mots). 

Kathryn Greer, ex- CTO @SmartAngels, entrepreneuse et artisan dans l’âme

Sur les bancs de l’école

Passionnée de Tech depuis son plus jeune âge, c’est tout naturellement que Kathryn se lance dans le domaine en commençant par suivre une formation d’ingénieurs en informatique à EPITECH. « J’étais déjà dans l’entrepreneuriat et la tech avant l’école », raconte-t-elle. Durant ses études, Kathryn baignait clairement dans un environnement majoritairement masculin, mais elle ne s’est jamais sentie traitée différemment par les autres étudiants. « Je dois avouer qu’on était très peu de filles dans ma classe, et ce n’était pas très surprenant. Je m’y attendais, et ça ne m’a pas dérangé car je m’entends aussi bien avec les filles qu’avec les garçons ! », nous confie t-elle. Cette formation lui a permis de faire ses premières armes et de se professionnaliser, notamment grâce à différents stages en développement web, au cours desquels elle s’est beaucoup enrichie. Très humble, Kathryn nous affirme qu’elle ne savait pas qu’elle deviendrait CTO – du moins, pas aussi rapidement dans sa carrière. Ce poste lui paraissait véritablement inaccessible si vite… et pourtant : elle l’a fait ! « Je me suis rendu compte que beaucoup de startups recherchent des responsables techniques plutôt jeunes et ambitieux, qui savent se rendre disponibles pour se caler sur le même rythme qu’eux ».

L’aventure SmartAngels, les débuts au poste de CTO

A peine deux ans après sa sortie d’école, Kathryn est débauchée par l’un de ses anciens professeurs d’EPITECH pour intégrer une jeune startup en tant que CTO. En Janvier 2015, elle devient alors CTO de SmartAngels, une plateforme de crowdfunding qui permet aux particuliers et professionnels d’investir dans le développement de startups et PME. « Au début, c’était stressant car on change de scope de responsabilités mais j’ai adoré l’aventure car je suis passionnée d’entrepreneuriat », Elle raconte qu’il y avait tout à faire. Kathryn a démarré l’aventure avec un développeur en stage pour commencer à travailler sur le développement du MVP, puis elle a construit une équipe technique de 8 personnes qu’elle a accompagné pendant presque 4 ans. Peu à peu, le management prenait de plus en plus de place dans son rôle, qu’elle a su faire évoluer en même temps que la structure. « Le travail de CTO varie beaucoup d’une entreprise à l’autre, suivant sa maturité et la structure des équipes. Et aussi de comment tu as envie de travailler ! C’est très flexible comme métier ». Pour Kathryn, ce qui est essentiel quand on est CTO c’est d’apprendre à déléguer. « Pour moi, c’est très important de savoir déléguer. Au début, je me retrouvais à coder la journée et être CTO le soir », dit-elle en riant. Mettre en place un accompagnement de proximité avec les équipes permet peu à peu de les responsabiliser sur les projets et de pouvoir se consacrer à d’autres sujets de fond.

CTO… mais pas que !

Animée par la volonté d’entreprendre, Kathryn décide de quitter SmartAngels fin 2018 pour se consacrer au développement et à l’accélération de son entreprise personnelle, dans le monde de l’art et l’artisanat. Et oui, en plus d’être CTO de startups tech, Kathryn travaille le verre au chalumeau pour créer des bijoux en verre fleuris. Ses œuvres sont incroyables et c’est bientôt Noël… alors pour les intéressé(e)s, c’est par ici : https://kathryngreer.com/fr/ !

En parallèle – et parce que la tech c’est vraiment son dada – Kathryn décide de travailler comme CTO freelance pour Kraaft, une startup qui propose un outil de suivi de travaux. De beaux défis se présentaient à elle : développement du MVP, construction et gestion de l’équipe technique, mise en place d’une culture tech et des bonnes pratiques de développement… bref, un rôle riche de missions où elle ne s’est pas ennuyée une seconde !

L’heure du bilan

Avec du recul, la grande fierté de Kathryn c’est son expérience de CTO chez SmartAngels. « Les débuts étaient difficiles car j’apprenais le métier sur le terrain. Mais avec toute l’équipe, on a vraiment réussi à faire de belles choses ensemble ». Forte d’un vrai leadership empathique (pour ceux qui ont suivi nos précédents posts !), Kathryn a su déceler les talents qui avaient le bon profil pour rejoindre l’aventure, et elle en est très fière. « Ensemble, on a mis en place des pratiques pour délivrer du code de qualité, l’ambiance était très bienveillante et j’avais un très faible taux de turnover. En fait, personne n’est partie parce qu’il ne se plaisait plus chez nous. », assure-t-elle. Pour Kathryn, le rôle du CTO c’est aussi savoir instaurer un climat de confiance et de bienveillance dans lequel chacun se réalise. Il faut savoir embarquer une équipe, l’engager et la fédérer sur les projets. Kathryn, c’est cette femme si inspirante, qui, grâce à sa persévérance, son travail et son talent a rencontré beaucoup de succès ! Alors on a eu envie de connaitre ses difficultés dans le métier. Dans toutes ses expériences, elle ne s’est jamais sentie considérée illégitime de sa fonction ou inférieure par ses pairs. « Je gérais des équipes techniques majoritairement masculines et je n’ai jamais ressenti de méfiance ou de doutes vis-à-vis de ma position parce que j’étais une femme », nous explique-t-elle. En revanche, elle a parfois eu l’impression de devoir redoubler d’efforts pour être prise au sérieux par d’autres interlocuteurs, non tech.

Parlons peu, parlons bien : c’est quoi un bon Tech Leader ?

Pour en apprendre plus sur le métier, notre démarche a été de comprendre la vision de Kathryn sur celui-ci.

Selon elle, un bon tech leader est avant tout quelqu’un qui sait s’entourer des bonnes personnes. « Il faut avoir de bonnes connaissances techniques mais on ne peut pas être expert dans tous les domaines. Alors il faut savoir recruter des spécialistes de chacun d’eux », nous explique-t-elle. Elle accorde également beaucoup d’importance à l’écoute, la prise de recul, la détection de problèmes et la capacité à réagir vite. « Il faut aider les équipes à évaluer la difficulté, et évoluer pour la surpasser ». Côté technique, ce qui est essentiel c’est d’apporter de la vision long terme sur l’ensemble du projet afin de prendre les bonnes décisions, de donner du contexte, et d’engager les équipes avec soi.

Et pour finir, les questions qui fâchent

Le mouvement Women in Tech informe que seulement 7% des postes Tech sont occupés par des femmes. Pour quelles raisons selon toi ? 

K.G : Je pense que c’est lié à l’éducation des jeunes filles quand elles sont au collège et au lycée. Personnellement, j’ai grandi dans une famille d’ingénieurs et d’entrepreneurs. Pour te dire, mon père me faisait coder à 12 ans alors j’ai très vite su ce que j’avais envie de faire plus tard ! Mais dans mon lycée, aucune autre fille ne voulait être développeuse, et d’ailleurs on ne présentait jamais ce métier lors des sessions d’information et d’orientation à l’école. C’est dommage, mais je pense que c’est plutôt lié à l’éducation.

C’était difficile de faire ta place en tant que C-level, qui plus est dans la tech ?

K.G : En fait, ça s’est fait très naturellement. Je pense que pour prendre cette position, c’est plus une question de caractère et d’attitude face aux équipes internes. J’ai toujours aimé les métiers liés à l’architecture, la planification, et je gérais déjà des équipes depuis ma sortie d’école donc c’était très naturel.

J’ai lu une étude salariale de TechRocks, auprès des leaders de la tech. A ancienneté égale, les femmes CTO gagnent en moyenne 10% de plus que les hommes. Qu’en penses-tu ? 

K.G : Je n’ai jamais parlé salaire avec mes homonymes masculins donc je ne sais pas, après j’imagine que chacun négocie son salaire comme il le peut !

Nous avons récemment fait un post sur l’importance du leadership empathique. En tant que CTO, tu dois être amenée à recruter des profils techniques. Comment t’assures-tu du fit avec ton équipe ? 

K.G : J’ai mis en place un processus de recrutement en plusieurs étapes. La première, c’est moi qui prends la main car j’ai l’impression de bien ressentir s’il y avait un fit humain ou non. J’aime être la première à rencontrer les candidats, pour confirmer ou non mon intuition suite à la lecture du CV et au premier call. Je suis quelqu’un d’empathique et j’arrive plutôt bien à ressentir les choses. Ensuite, le candidat rencontre toujours l’équipe technique pour s’assurer du fit.

Quels conseils donnerais-tu aux jeunes femmes qui souhaitent s’orienter dans la tech ? 

K.G : Il faut se lancer, il ne faut pas hésiter ! Il ne faut pas avoir peur de rejoindre ce métier par peur de ce que diront les collègues. Personnellement, je n’ai jamais rencontré de soucis liés au fait que j’étais une femme. Finalement, on peut rencontrer les mêmes difficultés que dans n’importe quel autre métier. Il y aura toujours des personnes plus ou moins gentilles mais je ne pense vraiment pas que ce soit lié à la différence de genres.

Si tu avais une baguette magique, qu’est-ce que tu changerais ? 

K.G : Le nombre d’heures dans une journée ! Je n’ai pas assez de temps pour faire tout ce que j’aurais envie de faire, alors je rajouterai quelques heures.

Pour le mot de la fin, nous en retiendrons 4 : il faut se lancer !!

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